BAPTISTE MASOTTI : « ON VOULAIT ENCORE PLUS, MAIS LA MÉDAILLE DE BRONZE EST UNE SATISFACTION »
Équipe de france 11/01/2024
L’Angleterre était trop forte en demi-finale du championnat du monde, mais l’équipe de France masculine a accompli sa mission en ramenant la médaille de bronze de Nouvelle-Zélande.
Avec 7 podiums lors des 9 dernières éditions, les Bleus confortent leur statut de membre du top 3 planétaire. Pour la plus grande satisfaction de leur capitaine Baptiste Masotti, qui revient sur ce bon résultat avec quelques semaines de recul.
Propos recueillis par Jérôme Elhaïk
UN GROUPE QUI VIT BIEN
Jérôme Elhaïk : Baptiste, tout d'abord je suppose que ça a fait du bien de couper un peu après cette longue tournée en Asie et en Océanie ?
Baptiste Masotti : Clairement, oui, surtout que le trajet retour a duré 40 heures, un enfer (rires). Heureusement qu’on avait une médaille dans nos valises sinon ça aurait paru encore plus long … En ce qui me concerne, j’ai continué à faire de l’activité physique, mais j’ai posé la raquette quelques jours pendant les fêtes. Même s'il faut retrouver les repères quand on revient sur le court, je sais que ça va aller de mieux en mieux.
J.E. : Avec le championnat du monde et les tournois PSA qui ont eu lieu avant, les joueurs de l’équipe de France et le staff ont passé beaucoup de temps ensemble, ce qui est assez inhabituel.
B.M. : Je pense même que ça n’était jamais arrivé avant ! On se connaît tous, on s’entend très bien et les choses se font de manière naturelle, néanmoins il a fallu trouver le bon dosage pour que la vie de groupe se passe bien.
« Même si je suis capitaine, chacun a son mot à dire au sein du groupe. »
J.E. : Tu es le capitaine de l’équipe, quelles sont les particularités de ce rôle ?
B.M. : Ce n’est pas comme dans un sport collectif, au squash la seule tâche qui est véritablement dévolue au capitaine est l’échange des écussons. Pour le reste, même si je prends la parole avant les rencontres, j’ai envie de dire qu’on est tous capitaines au sein de l’équipe. Chacun a son mot à dire, et on se tire tous vers le haut.
Le groupe France a vécu en harmonie pendant plusieurs semaines (Crédit photo : Laurent Vendée)
LES BLEUS SAVOURENT LE BRONZE
J.E. : Revenons sur la compétition. Comme il y a quatre ans, vous avez obtenu la médaille de bronze, qui était votre objectif minimum si on peut dire ?
B.M. : Oui c’est ça, on voulait absolument ramener une médaille voire plus. Sur le papier, c’était un meilleur tirage d'affronter l’Angleterre en demi-finale plutôt que l’Égypte, mais on est tombés sur des frères ElShorbagy qui nous ont donnés une leçon d’expérience et de sang-froid.
J.E. : Est-ce que vous avez des regrets concernant cette rencontre ?
B.M. : Pas vraiment. Victor avait clairement laissé des plumes dans son combat de la veille contre Joel Makin et Mohamed a été très solide. Quant à moi, peut-être que les choses auraient été différentes si j’avais pris le premier jeu (NDLR : Baptiste a eu une opportunité), mais là aussi Marwan a très bien mené sa barque. Si je dois avoir un regret, c’est plutôt dans la manière dont j’ai géré le temps entre mon quart de finale à l’open de Nouvelle-Zélande contre Makin et cette demi-finale. Dans cet intervalle d'une semaine, je n’ai joué qu’un match contre l’Australie et peut-être que j’aurais pu faire les choses différemment en termes d’activation etc.
J.E. : Au final, tu n’as donc joué que deux matches dans le championnat du monde, car en 1/8ème et en quart le tirage au sort t’avait placé en dernier et la France a gagné 2-0. J’imagine que ça a été un peu frustrant ?
B.M. : Bien évidemment. Contre le Pays de Galles, on est passé par toutes les émotions. Comme le match de Victor contre Makin était équilibré sur le papier, je savais que je pouvais éventuellement être amené à jouer. Il a gagné, ensuite Auguste avait un adversaire à sa portée mais a galéré donc je me suis de nouveau préparé à rentrer sur le court. Emyr Evans est un joueur qui hausse son niveau de jeu en sélection, il l’a montré les jours suivants en battant Raphael Kandra et Shahjahan Khan, donc malgré l’écart au classement j’étais prêt pour un match décisif compliqué.
Après une belle entame, Baptiste Masotti a subi la domination de Marwan ElShorbagy en demi-finale contre l'Angleterre (Crédit photo : World Squash Federation)
J.E. : Je reviens sur la rencontre contre l’Angleterre. Est-ce que pour l’équipe, et pour toi, c’est frustrant de perdre contre les frères ElShorbagy, qui ne jouent pour ce pays que depuis peu de temps ?
B.M. : Personnellement, ça ne me dérange pas du tout. Il ne faut pas oublier que Mohamed et Marwan vivent là-bas depuis de nombreuses années, et en plus l’Angleterre avait déjà fait ça dans le passé avec Peter Nicol. Aujourd’hui, ils évoluent pour ce pays, il faut faire avec. C’est sûr qu’avant on affrontait des gars qui avaient joué pour l’Angleterre toute leur vie, comme Nick Matthew, Daryl Selby, Peter Barker etc., mais peu importe.
« On est très contents de cette médaille de bronze, beaucoup de pays aimeraient être à notre place. »
J.E. : Dans l’ensemble, monter sur le podium est donc une satisfaction ?
B.M. : Tout à fait, il ne faut pas banaliser ce résultat. C’est une nouvelle médaille de bronze, il y a pas mal de pays qui aimeraient être à notre place.
J.E. : Le fait de ne pas jouer la rencontre pour la 3ème place, et que les deux perdants des demi-finales montent sur le podium, tu en penses quoi ?
B.M. : Ça ne me dérange pas plus que ça. On sait que c’est compliqué de revenir sur le court le lendemain après une défaite en demi, donc savoir qu’on est assurés d’une médaille quand on passe le quart a un côté sécurisant.
En décrochant une nouvelle médaille de bronze, les Bleus confortent leur position dans le top 3 mondial (Crédit photo : World Squash Federation)
C'EST DÉJÀ DEMAIN
J.E. : La prochaine compétition internationale pour l’équipe de France sera le championnat d’Europe début mai en Suisse, est-ce que vous y pensez déjà ?
B.M. : Oui on y pense, même s’il y aura beaucoup de tournois sur le circuit PSA d’ici là. On a très envie de retrouver l’Angleterre. Avec notre densité, le format à 4 joueurs est plus favorable pour nous même s’il ne faut pas oublier qu’ils nous ont battus en finale de la dernière édition. On sait aussi que si on veut les bousculer, il faut qu’on augmente tous notre niveau individuel, et qu’on aille encore plus loin dans les gros tournois afin d’avoir plus d’expérience de ces moments-là.
J.E. : La France avait battu plusieurs fois l’Angleterre entre 2015 et 2018, néanmoins depuis ils ont repris le dessus.
B.M. : En effet, mais à l’époque on pouvait s’appuyer sur Grégory Gaultier et Mathieu Castagnet. Il y a eu pas mal de changements dans les deux camps ces dernières années, on va dire que c’est eux qui ont un peu mieux négocié cette transition, notamment grâce à l’arrivée des frères ElShorbagy.
« Si on veut battre les Anglais, il faut qu'on augmente tous notre niveau individuel. »
J.E. : À plus long terme, il y aura une autre compétition internationale, les JO de 2028 à Los Angeles. C’est dans un coin de votre tête, ou pas encore ?
B.M. : C’est encore lointain, pour la simple raison que pour l’instant on ne sait absolument rien des critères de qualification. On va laisser passer les Jeux de Paris, quand on aura des infos ce sera plus simple de se projeter. Ce qui est sûr, c’est qu’en France il y a des jeunes qui vont taper à la porte et il y aura beaucoup de prétendants, ce sera intéressant.
J.E. : Dans ce contexte, les résultats de l’équipe de France sont très importants.
B.M. : Évidemment, car les médailles dans les compétitions internationales seront normalement un critère pour l'attribution du nombre de places par pays.
En 2018, Baptiste Masotti avait fait exploser le camp français en remportant le match décisif en finale du championnat d'Europe (Crédit photo : SquashPage.net)
EN QUÊTE DE CONSTANCE
J.E. : À titre individuel, quel est ton regard sur ton début de saison 2023-2024 ?
B.M. : Globalement, il est positif, j’ai égalé mon meilleur classement (NDLR : 14ème) et atteint une finale sur un tournoi Gold, qui s’ajoute à celle de mars à l’Optasia Championship. Dernièrement, je n’ai pas été gâté par les tirages au sort même si ça fait partie du jeu. Maintenant, il faut que je sois plus constant, et que je batte plus souvent les joueurs du top 10.
J.E. : Justement, est-ce qu’intégrer ce top 10 est l’un de tes objectifs à court terme ?
B.M. : Pas vraiment, je ne veux pas me focaliser là-dessus. Comme je le disais auparavant, ma priorité est de gagner en régularité en me donnant à 100 % tous les jours, que ce soit à l’entraînement ou en match.
Sa victoire sur Mostafa Asal à la Grasshopper Cup est le résultat marquant de Baptiste Masotti depuis le début de la saison (Crédit photo : PSA World Tour)
J.E. : Ton prochain tournoi sera le Tournament of Champions à partir du 17 janvier à New York, où tu pourrais affronter le numéro 1 mondial Ali Farag.
B.M. : En effet, mais avant cela il y aura un 1/16ème de finale (NDLR : en tant que tête de série 9/16, Baptiste est exempté de premier tour) contre le vainqueur du duel 100 % Indien entre Saurav Ghosal et Ramit Tandon. Ce sont deux joueurs au style très différent, ça fait un bout de temps qu’on ne s’est pas croisés. Même si ce sera dans tous les cas un match difficile, pour une fois je ne joue pas un top 10 d’entrée donc je ne peux pas me plaindre.
J.E. : Avec le retour du diviseur au 1er janvier*, les joueurs n’ont plus intérêt à jouer tous les tournois comme c’était le cas depuis le covid et ça change un peu la donne ...
B.M. : C’est vrai, il faut bien réfléchir à sa programmation et être calculateur, ce qui n’est pas forcément mon point fort (rires). Une chose est sûre, il y a énormément de tournois jusqu’à la fin de la saison, et par conséquent de nombreuses opportunités à saisir.
*Depuis septembre 2020, seuls les 10 meilleurs résultats étaient comptabilisés, et les contres-performances avaient donc moins d'impact.
BAPTISTE MASOTTI EN ÉQUIPE DE FRANCE
Crédit photo : World Squash Federation
7 compétitions : 20 matches, 15 victoires, 2 défaites*
🥇 Champion d'Europe par équipe 2015 et 2018
🥉 Médaillé de bronze au championnat du monde par équipe 2019 et 20
